30 Déc 2017

Pourquoi partir en retraite avec un trimestre en moins ?

L’accord AGIRC-ARRCO du 30 octobre 2015 prévoit (entre autres) que si vous faites valoir vos droits à la retraite à l’âge légal de départ (62 ans si vous êtes nés en 1955 et après) avec tous les trimestres requis pour percevoir une retraite à taux plein (166 trimestres pour la génération 1957 jusqu’à 173 pour les personnes nées en 1973 et au-delà), vous subirez une minoration (appelée coefficient de solidarité) de 10 % sur vos retraites complémentaires pendant 3 ans et ce à partir du 1er janvier 2019 pour la génération 1957.

Ouf ! il y a une solution, l’accord stipule que si vous décidiez de décaler votre retraite d’un an, ce malus ne serait pas appliqué.

Mon frère n’a pas de chance, il aura 62 ans le 1er avril 2019, mais il ne pourra faire valoir ses droits à la retraite à taux plein, il lui manquera 1 seul trimestre. De ce fait, il devra attendre le 1er juillet 2019, il aura alors 62 ans et 3 mois et mais surtout tous ses trimestres (et pas un de plus). Il subira donc pendant 3 ans un malus de 10 % sur sa retraite ARRCO (12.000 €) et AGIRC (30.000 €) soit 4.200 € par an pour un total de 12.600 €  sur 3 ans.
En cette fin d’année, il me vient une idée lumineuse : je lui conseille de partir le 1er avril 2019, il aura bien au moins l’âge légal (62 ans) mais pas tous ses trimestres, il lui en manquera 1.
L’accord AGIRC-ARRCO précise que seuls ceux ayant tous les trimestres permettant de percevoir une retraite à taux plein subissent la décote de 10 %. Je viens de faire gagner à mon frère 12.600 € : joli cadeau en cette fin d’année.
Mais malheureusement, mon frère subira une décote d’un autre genre n’ayant pas réussi à avoir tous ses trimestres. Cette décote est de 1 % (par trimestre manquant) pour les retraites ARRCO-AGIRC soit 420 € par an.
La retraite de base (Sécurité Sociale) subira un abattement de 1.25 % soit 258 € par an pour mon frère.
Il aura donc d’un côté gagné 12.600 € et perdu de l’autre 678 € par an. Il lui faudra donc presque 19 ans pour que ce manque à gagner annuel arrive à compenser le gain de 12.600 €. Il aura alors 81 ans soit plus que son espérance (statistique) d’être en vie.
Si mon frère était marié, la réversion ferait évidemment partie des hypothèses de calcul.
Alors quand il est possible de partir à la retraite à l’âge légal mais avec 1 trimestre voire 2 de moins que le minimum requis, doit-on quand même partir ?
Prenez vos calculettes, les simulations méritent d’être effectuées.
Au fait, j’avais oublié de vous le dire, mon frère a fait valoir ses droits à la retraite le 1er avril 2019.

Bonne année !

Commentaires

  • Bruno Cassajus
    28 février 2018 Répondre

    Bonjour Monsieur Nino,
    Merci pour cet article très intéressant dont les éléments principaux sont repris dans l’article de Mme Nathalie Cheysson-Kaplan publié sur capital.fr.
    Il se trouve que je suis pile dans le même cas que votre frère, à la seule différence que j’aurai 60 ans fin Mars 2019 et qu’à cette date, j’aurai 166 trimestres cotisés. il m’en manquera 1 seul pour pouvoir demander ma retraite au terme du 2eme trimestre 2019, soit le 1er Juillet 2019.
    Je précise que je bénéficie du statut dit de carrière longue qui me permet donc de partir à 60 ans au lieu de 62 ans.
    La simulation faite m’engage à utiliser votre système de demander ma retraite avec 1 trimestre de moins , soit au 1er Avril 2019 (si celui ci fonctionne avec la demande de retraite anticipée pour carrière longue).
    Le seul problème est que Agirc-Arrco que j’ai contacté ne sont pas du tout au courant de cette possibilité et me disent que le malus de 10 % s’appliquera quand même pendant 3 ans…
    Pouvez-vous me confirmer les données de votre article ?
    Je vous remercie d’avance pour votre aide.
    Bien cordialement
    Bruno Cassajus

  • Alain Jeanroy
    21 août 2018 Répondre

    Bonjour Monsieur Nino,
    Est-il encore temps pour votre frère de changer de décision ? Il pourrait envisager de la faire après avoir lu la suite de ce commentaire.
    Vous avez raison de vous interroger sur les conséquences du malus sur les retraites complémentaires, par contre la comparaison des différents scénarios doit être faite de manière rigoureuse, en effectuant un bilan de chaque scénario sur une même période englobant tous les écarts.
    Dans le cas de l’exemple donné, il faut comparer les sommes gagnées sur 39 mois, à partir du 1er avril 2019, pour déterminer ensuite la date d’arrivée à l’équilibre entre les deux options.
    Option 1 – Travail jusqu’au 1er juillet pour liquidation de la retraite à taux plein
    Les sommes à prendre en compte sont :
    • 3 mois de salaire
    • 36 mois de retraite à taux plein
    • Malus de 10 % sur la retraite complémentaire
    Option 2 – Liquidation de la retraite le 1er avril, avec décote pour manque d’un trimestre
    Les sommes à prendre en compte sont :
    • 39 mois de retraite avec décote

    Les données de l’article permettent de calculer une retraite à taux plein de 5220 €, une retraite avec décote de 5164 € et un salaire, avec une hypothèse de taux de remplacement de 62 %, de 8419 €.
    Au bout de 39 mois, l’option 1 conduit à un montant net de 200 577 €, et l’option 2 à un montant de 201 377 €. L’écart entre les deux options n’est donc que de 800 €. La différence (salaire – retraite) sur les 3 premiers mois a compensé l’essentiel du malus sur la retraite complémentaire.
    Après les 39 mois, le gain annuel avec l’option 1 est de 678 €. Il ne faudra donc que 1,2 an, soit 4 ans après le départ en retraite, pour compenser intégralement le malus et non près de 19 ! Avec l’option 1, le gain est de près de 4000 € sur les 10 premières années de retraite.
    Cela peut radicalement changer le choix effectué, avec bien sur la prise en compte de biens d’autres éléments : santé, intérêt du travail, impôt, …
    En réalité, la question du dernier trimestre se pose surtout dans le cas d’un rachat de trimestres. Le dernier trimestre coûte alors très cher : retraite au lieu de salaire, coût du trimestre et malus ! La même méthode de comparaison est à appliquer pour évaluer l’intérêt de ce rachat.
    Bien cordialement,
    Alain Jeanroy

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